Sidney Olcott

cinéaste canadien

Sidney Olcott, né le [1], à Toronto (Canada), et mort le à Hollywood (États-Unis), est un pionnier du cinéma américain : acteur, réalisateur, scénariste et producteur. On lui doit le premier Ben-Hur (1907); le premier film de fiction tourné en Irlande The Lad from Old Ireland (1910) ; l'un des tout premiers longs métrages américains From the Manger to the Cross (1912)[2], la seule Passion du Christ filmée en Égypte et en Palestine.

Sidney Olcott
Portrait de Sidney Olcott en 1922.
Biographie
Naissance
Décès
Nationalité
Activités

Il met en scène Mary Pickford, Marguerite Clark, George Arliss, Marion Davies, Norma Talmadge, Gloria Swanson, Rudolph Valentino, Pola Negri, Jetta Goudal, Richard Barthelmess, Norman Kerry...

Biographie

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Acteur de théâtre

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Né à Toronto (Canada), Sidney Olcott émigre aux États-Unis en 1903. Acteur de théâtre, il est à l'affiche de pièces comme From the Rag to the Riches (1904)[3], Billy the Kid (1906)[4] avec Joseph Santley, la star-enfant en vedette.

Parallèlement, Sidney Olcott travaille comme acteur de cinéma à l'American Mutoscope and Biograph Company. Son premier film est une bande comique Wanted : a Dog (1905)[5]. Il joue aussi dans 2 A. M. in the Subway dont une copie figure au catalogue de la Bibliothèque du Congrès.

Les années Kalem

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The Pony Express, le premier film réalisé par Sidney Olcott

En 1907, il rejoint la Kalem nouvellement créée par George Kleine, Samuel Long et Frank J. Marion et dont les initiales K-L-M fournissent le nom de la compagnie. Olcott devient producteur, réalisateur et acteur de la firme. Il est à l'affiche d'un des tout premiers films de la compagnie dont l'emblème est un soleil éclatant : The Pony Express avec à ses côtés Joseph Santley, son frère Fred Santley et Robert G. Vignola qui resteront ses amis pour la vie.

Olcott tourne un film par semaine. Comme Kalem n'a pu investir dans un studio permanent, il filme en décor naturel dans les rues de New York mais surtout de l'autre côté du l'Hudson, à Fort Lee New Jersey, qui deviendra la première grande capitale du cinéma américain.

Réalisateur du premier Ben-Hur

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Carton inter-titre de Ben-Hur

Parmi les films tournés par Sidney Olcott en 1907, on trouve The Sea Wolf, tiré du roman de Jack London ; Nathan Hale, le premier espion des États-Unis d'Amérique ; The Redman's Way, un western avec des Indiens… On doit aussi à Olcott le premier Ben Hur.

Durant l'hiver 1908-1909, Sidney Olcott s'installe à Jacksonville (Floride), la plus grande ville de l'État. Ici, contrairement à New York, le froid n'empêche pas les tournages. La lumière est abondante et les loyers ne sont pas chers. Le Canadien inaugure une nouvelle organisation professionnelle au cinéma: la troupe. Comme au théâtre, il engage acteurs et techniciens pour une saison. Parmi eux Gene Gauntier, baptisée la Kalem Girl, l'actrice vedette la compagnie qui est aussi la scénariste, les acteurs Kenean Buel, futur réalisateur, James Vincent... Olcott tourne une série de films sur la guerre de Sécession, d'un point de vue sudiste, d'histoires de petits blancs du Sud, de la Floride espagnole et des westerns avec des Indiens Seminoles... Parmi les premiers films : A Florida Feud, The Octoroon, The Seminole's Vengeance... Au printemps, Olcott rentre à New York.

La balade irlandaise

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La troupe irlandaise de Kalem
 
Rory O'Mores

À l'été 1910, Sidney Olcott est envoyé par Frank J. Marion en Europe, pour faire le premier film américain jamais tourné entre deux continents[6]. Il est accompagné de Gene Gauntier et George K. Hollister, le cameraman. En Irlande, il tourne The Lad from Old Ireland et The Irish Honeymoon. Le trio se rend ensuite en Allemagne pour y tourner The Little Spreewald Maiden.

Automne à Fort Lee, New Jersey, hiver à Jacksonville, Floride puis l'été en Irlande avec une troupe complète composée des acteurs Gene Gauntier, Alice Hollister, la femme de George, Agnes Mapes, Anna Clark et son fils Jack J. Clark, Robert G. Vignola, J. P. McGowan, Arthur Donaldson, de George K. Hollister, le cameraman et Allen Farnham, le décorateur. L'équipe s'installe à Beaufort, près de Killarney dans le comté de Kerry. Olcott tourne cet été-là treize films. Des films à costumes : Rory O'Mores, O'Neill, La Colleen Bawn et Un patriote irlandais tirés de pièces de Dion Boucicault, deux films de trois bobines, les tout premiers de Kalem et du cinéma américain. Les autres films « irlandais » de cet été 1911 sont des histoires contemporaines sur fond d'émigration vers les États-Unis : The Fishermaid of Ballydavid, Sa mère, Far from Erin's Isle...

Une épopée en Égypte et en Palestine

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La troupe des O'Kalems au Louxor Hotel en Égypte

De retour aux États-Unis, Sidney Olcott a à peine le temps de défaire ses malles qu'il reçoit un télégramme de Frank J. Marion lui demandant de préparer une expédition pour l'Égypte et la Palestine. Le 2 décembre, les O'Kalems, comme les ont baptisés les journaux professionnels après l'épopée irlandaise, embarquent à New York, à bord du paquebot SS Adriatic de la White Star Line à destination de Naples (Italie). Ils font escale à l'île de Madère (Portugal), Gibraltar (Royaume-Uni), Alger (Algérie), Gènes (Italie). À chaque fois Olcott et Hollister en profitent pour tourner un documentaire mettant en scène les membres de la troupe visitant les beautés locales.

À Naples, l'équipe embarque peu avant Noël à bord du Prinz Heinrich de la North German Lloyd en direction d'Alexandrie en Égypte qui est atteinte en trois jours. Olcott et les siens s'installent quelques jours au Caire avant de rejoindre en train Louxor pour tourner une série de films de une ou trois bobines. Des histoires sentimentales mettant en scène des Occidentales enlevées par des bandits bédouins: Une tragédie du désert, Winning a Widow, Captured by Bedouins, Down Through the Ages...

La Passion du Christ tournée in situ

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De la Crèche à la Croix, le Christ recrute ses Apôtres au lac de Tibériade
 
De la Crèche à la Croix, tourné en Égypte et en Palestine

Mais la grande affaire de l'expédition est De la Crèche à la Croix (From the Manger to the Cross), la vie et la mort du Christ tourné sur les lieux mêmes décrits dans les Évangiles. Devant les pyramides de Guizeh, a été filmée la fuite en Égypte. Le 2 avril, depuis Port Saïd, les faiseurs de films gagnent Jaffa en bateau puis Jérusalem en train. Ils s'installent à l'hôtel Fast, Jaffa Road entre la porte de Jaffa et la porte Neuve. Fidèle à sa méthode, Sidney Olcott privilégie les décors naturels. Mais pour les scènes d'intérieur, il a besoin d'un studio. Il l'installe de l'autre côté de la Jaffa Road sur un terrain qui s'appuie sur les murs de la vieille ville. Le studio est dominé par le couvent des Fiancées de Jésus. Olcott et Hollister profitent de la semaine de Pâques pour filmer les différentes cérémonies à Jérusalem.

C'est Gene Gauntier qui a écrit le scénario mais Olcott va s'inspirer des aquarelles du peintre français James Tissot qui illustrent sa célèbre Bible, devenant ainsi sans doute le premier story board de l'histoire du cinéma[7]. Le 12 avril, Olcott traverse la Méditerranée et l'Europe centrale pour gagner Londres et embaucher l'acteur qui interprétera Jésus-Christ. Il choisit un acteur shakespearien Robert Henderson-Bland, qui n'a jamais fait de cinéma. Ce dernier refuse dans un premier temps mais se laisse convaincre par la force de persuasion et l'enthousiasme d'Olcott[8].

À Londres, Olcott a complété sa distribution en embauchant une demi-douzaine d'acteurs britanniques dont Percy Dyer qui jouera Jésus enfant. « Il avait 16 ans mais en paraissait 12 », dit le réalisateur[9]

 
The Kerry Gow

Sidney Olcott est de retour à Jérusalem avec ses nouvelles recrues moins de trois semaines après son départ. Le studio est terminé. Hollister plante sa caméra à Bethléem, Nazareth, au lac de Tibériade, à Jéricho, à la tombe de Lazare et dans tous les lieux bibliques de la ville sainte : la porte des Lions, le mont des Oliviers, le jardin de Gethsémani, Via Dolorosa... Le tournage est éprouvant. Il fait chaud. Tout est en boite fin mai. Et pourtant il n'est pas question de rentrer à la maison. Les O'Kalems rejoignent Jaffa, embarquent pour Port-Saïd, gagnent Alexandrie, embarquent pour Trieste puis traversent l'Europe centrale en train jusqu'à Hook aux Pays-Bas. Traversée de la mer du Nord jusqu'à Londres puis, après quelques jours de repos dans la capitale britannique, direction l'Irlande. Les O'Kalems retrouvent leurs habitudes à Beaufort. Manque à l'appel, Gene Gauntier qui embarque le 22 juin à bord du SS Mauritania à Liverpool pour les États-Unis. Elle emporte avec elle les deux dernières bobines de De la crèche à la croix. À Beaufort, Olcott va diriger sept films, dont deux trois-bobines : The Kerry Gow et The Shaughraun, d'après une pièce de Dion Boucicault.

Un des premiers longs-métrages

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Le 12 octobre le SS Adriatric de la White Star jette les amarres au port de New York. À son bord les O'Kalems qui ont passé 315 jours loin de chez eux. Sidney Olcott et Gene Gauntier arrivent à temps pour assister à l'avant-première de De la Crèche à la Croix, donnée le 14 octobre à l’auditorium des magasins Wanamaker, 770 Broadway, à New York. Frank J. Marion a invité des religieux pour désamorcer une polémique qui monte : a-t-on le droit de faire un film sur la vie du Christ ? Le film ne sera pas censuré aux États-Unis mais il va changer les modes d'exploitation au cinéma. Long de cinq bobines, c'est un des tout premiers longs-métrages américains, il ouvre la porte à des sujets longs et sérieux capables d'attirer un public plus « bourgeois » dans les salles obscures[10].

Olcott démissionne de Kalem

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En fait Sidney Olcott va rester à l'écart de l'exploitation du film. Il a démissionné de Kalem. Alors qu'il était en Irlande il a reçu une lettre de Frank J. Marion qui lui expose les conditions de son nouveau contrat. Parlant de menaces de procès gouvernementaux, d'une concurrence croissante et d'un probable chute des ventes, il propose à Olcott de baisser son salaire hebdomadaire de 200 $ à 150 $[11]. Marion ajoute qu'il l'aidera à se mettre à son compte s'il le désire. La troupe des O'Kalems éclate. Gene Gauntier démissionne à son tour ainsi que Jack J. Clark, qu'elle a épousé à Jérusalem, et Allen Farnham.

Vignola, McGowan, les Hollister restent chez Kalem.

Gene Gauntier Feature Players

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Come Back to Erin
 
A Daughter of Confederacy, le premier film produit par Gene Gauntier Feature Players

Le 2 décembre 1912, la presse professionnelle annonce la création d'une nouvelle maison de production : Gene Gauntier Feature Players. Elle a établi ses quartiers 515, 54th Street West, à New York[12] Sidney Olcott et Gene Gauntier reproduisent ce qu'ils ont expérimenté chez kalem : hiver à Jacksonville, Floride; printemps et automne à New York; été en Irlande... Le premier film estampillé GGFP est A Daughter of the Confederacy, une histoire de la guerre de Sécession, tournée à Jacksonville. Un trois-bobines qui devient le standard de la compagnie. Parmi les autres films : The Mystery of Pine Creek Camp, When Men Hate, tournés en Floride; For Ireland's Sake, Come Back to Erin, deux films dont il subsiste des bobines, et The Eye of the Government, tournés en Irlande... Jack J. Clark en est l'acteur principal, Gene Gauntier, l'actrice principale et la scénariste. Les films sont distribués par Warner's Features.

Gene Gauntier et Sidney Olcott divorcent

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Valentine Grant.

En 1914, la donne change une nouvelle fois. Sidney Olcott ne fait plus partie de GGFP. Il a créé sa propre société: Sid Olcott International Features. Après huit ans de collaboration fructueuse, de complicité, d'aventures partagées, de galères, de grandes joies... le divorce est consommé sans qu'on en connaisse les raisons. Ainsi se termine une dualité artistique quasiment unique dans l'histoire du cinéma[10].

Olcott a d'abord besoin d'une actrice vedette. Il la croise dans un théâtre new-yorkais par hasard. Valentine Grant est chanteuse classique. Elle est neuf ans plus jeune que lui. Il l'aborde en lui demandant si elle veut faire du cinéma. Son charme, sa force de persuasion opèrent à nouveau. Valentine Grant craque et devient la vedette des films produits par Olcott avant de... l'épouser. When Men Would Kill en est le premier, tourné à Jacksonville, en Floride et à New York. D'autres suivent notamment l'été en Irlande, toujours à Beaufort, County Kerry : All for Old Ireland, Bold Emmett, Ireland's Martyr dont une copie subsiste et The Irish in America...

Les années studios

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En 1915, Sidney Olcott rejoint Famous Players Lasky. Il y tourne des films toujours avec Valentine Grant : The Innocent Lie (1916), The Daughter of MacGregor (1916); avec Marguerite Clark dans The Seven Sisters (1915); Mary Pickford dans Madame Butterfly (1915) et Peppina (1916)...

Dans les années 1920 on retrouve son nom dans des productions comme La Déesse rouge (The Green Goddess) (1923) avec George Arliss et Patricia (The Little Old New York) (1923) avec Marion Davies.

En 1924, c'est Norma Talmadge qu'il dirige dans Son œuvre. La même année, il signe un contrat avec Paramount. Il met en scène Gloria Swanson dans Les Loups de Montmartre puis Rudolph Valentino qui fait son retour au cinéma après deux ans d'absence dans Monsieur Beaucaire.

En 1925, il adapte Salome of the Tenements tiré du roman éponyme de Anzia Yezierska avec Jetta Goudal. Il dirige aussi Pola Negri dans La Charmeuse.

En 1926, il part chez First National Pictures et dirige Richard Barthelmess, à trois reprises dans : Ranson's Folly, Un gentleman amateur et Sous le regard d'Allah.

The Claw (1927), produit par Universal Pictures est le dernier film de Sidney Olcott.

En 1928, il part en Grande-Bretagne. Il a signé un contrat avec British Lion pour tourner dans les nouveaux studios d'Elstree[13]. Il doit réaliser The Ringer, l'adaptation d'une pièce d'Edgar Wallace. En désaccord avec la production, Olcott rompt son contrat et obtient des dommages et intérêts auprès des tribunaux britanniques[14]

L'avènement du cinéma parlant en 1927, le fera plonger dans l'oubli[réf. souhaitée].

Filmographie

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Comme réalisateur

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Comme acteur

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Comme scénariste

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Comme producteur

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Notes et références

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  1. (en) « One day, Sidney Olcott wanted to become an American », sur www.sidneyolcott.com (consulté le )
  2. Michel Derrien, From the Manger to the Cross, sur le site Sidney Olcott, le premier œil
  3. New York Dramatic Mirror, 2 janvier 1904
  4. The Billboard, 8 décembre 1906, p. 18
  5. « Sidney Olcott », sur sidneyolcott.com (consulté le ).
  6. The Film Index, 19 novembre 1910, p 36
  7. Première Passion, film de Philippe Baron, une production Vivement Lundi!
  8. Robert Henderson Bland, From the Manger to the Cross, p. 8-9.
  9. The Moving Picture World, vol. 19, n°3, p. 272, 17 janvier 1914.
  10. a et b Interview de l'historien américain Herbert Reynolds dans le documentaire de Philippe Baron Première Passion, 2010.
  11. Michel Derrien, Aux origines du cinéma irlandais : Sidney Olcott, le premier œil, p. 80
  12. The Moving Picture World, vol. 19, p. 964.
  13. Michel Derrien, Aux origines du cinéma irlandais: Sidney Olcott, le premier œil, TIR, p. 110.
  14. George Mitchell, Films in Review, avril 1954, p. 181.

Bibliographie

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  • Michel Derrien, Aux origines du cinéma irlandais: Sidney Olcott, le premier œil, TIR 2013. (ISBN 978-2-917681-20-6)

Cinématographie

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Liens externes

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