Réduire leur consommation d'eau, le défi des habitants du Cap pour éviter la catastrophe en 2018

Confrontés à une sécheresse sans précédent, en 2018, les habitants du Cap, en Afrique du Sud, ont du réduire leur consommation d'eau ©Getty - John Snelling
Confrontés à une sécheresse sans précédent, en 2018, les habitants du Cap, en Afrique du Sud, ont du réduire leur consommation d'eau ©Getty - John Snelling
Confrontés à une sécheresse sans précédent, en 2018, les habitants du Cap, en Afrique du Sud, ont du réduire leur consommation d'eau ©Getty - John Snelling
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La ville du Cap, en Afrique du Sud, a frôlé une crise de l'eau en 2018. Face à l'épuisement imminent des réserves, la ville a décidé de rendre publiques les consommations d'eau individuelles, entrainant une baisse de 30 % de la consommation.

Je reviens de Cape Town, en Afrique du Sud (on dit plutôt “le Cap”, en français) où j'ai participé, avec le maire, Geordin Hill-Lewis, au lancement d’un nouveau laboratoire de recherche sur l’air, l’eau et l’énergie. Durant ce lancement, Geordin Hill-Lewis, a fait l’éloge de la manière dont la ville et ses citoyens avaient géré une  crise particulièrement difficile, il y a quelques années de cela.

En effet, en 2018, la ville du Cap a évité de peu le “jour zéro”, où l’eau potable serait complètement épuisée. L’émergence de la crise et la manière dont le pire a été évité, sont riches d’enseignement pour nous. D’une part, parce que les français de Mayotte vivent aujourd’hui une situation similaire. Et d’autre part parce qu’il y a beaucoup à apprendre du rôle de la technologie, des comportements, et de la décision politique face à une catastrophe potentielle.

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Au Cap, les probabilités de sécheresse ont considérablement augmenté

D’après les prévisions des experts, l’approvisionnement en eau potable de la région du Cap devait en principe être capable de soutenir une période de sécheresse “normale”. Seule une succession de sécheresses extrêmes, qui ne pouvait se produire qu’avec une chance sur 300, pouvait faire courir un risque d’épuisement des réserves.

Mais une sécheresse importante en 2015, 2016, et 2017 est devenue cet évènement improbable. D’après une  étude de cas de Bloomberg, la maire, Patricia De Lille, commençait dès 2016 à s’impatienter contre les experts : le changement climatique devrait, selon elle, changer ces probabilités : l’improbable devenait de plus en plus possible. En 2016 et 2017, la ville a commencé à investir dans de nouvelles infrastructures pour apporter plus d’eau au Cap, mais il était trop tard pour que cette solution technologique apporte de l’eau à temps. Il fallait aussi changer les comportements. Pas forcément quelque chose de facile dans cette ville où l’inégalité est extrême et le changement devait forcément venir des plus riches.

Quand les consommations d'eau individuelles deviennent publiques

Depuis plusieurs mois, la municipalité communiquait fréquemment sur le risque de sécheresse. Le 18 janvier, la maire a décidé de franchir un pas de plus. Elle annonça que le 12 avril 2018 serait “jour zéro”, le jour où les robinets seraient arrêtés. Cette décision était un peu risquée : la ville du Cap vit du tourisme et de sa réputation de ville bien gérée, et les images de files d’attente devant des camions de distribution qui sont passés en boucle à la télévision en avance du jour fatidique n’étaient pas idéales.

Mais cette annonce a galvanisé les citoyens. La ville a rendu publique les consommations individuelles, et les rapports de consommations sont devenus des sujets de conversation. Les organisations civiques ont partagé des astuces et des défis. Les quartiers cossus ont imité les townships qui économisaient l’eau depuis longtemps. La consommation d’eau au Cap a baissé de 30 % par rapport aux mêmes mois les années précédentes. Tout cela a permis à la ville de repousser le jour zéro jusqu’en juin 2018. Entretemps, les pluies sont arrivées, et la sécheresse a été évitée.

La Revue de presse internationale
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En matière climatique, si la technologie ne peut pas tout, les comportements peuvent changer

La crise de l’eau et sa sortie au Cap est une bonne allégorie du problème du climat. L’exceptionnel devient routine. La technologie ne peut forcément pas nous sauver. Les comportements, eux, peuvent changer. Les citoyens du Cap ont su se rallier derrière cet effort héroïque. Ceux qui ne l’ont pas fait par sens civique l’ont fait pour éviter l'opprobre social ou l’arrêt brutal de leur eau potable après l’épuisement de leur quota. Et le plus encourageant de tout, c’est le maire actuel du Cap qui nous l’a dit : la consommation d’eau au Cap n’a pas rebondi après la crise. Il se trouve qu’une fois que les Capetoniens ont pris de bonnes habitudes, ils et elles ont su les garder. Tout cela prouve que nous devons, et nous pouvons, changer !

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