Élection présidentielle au Tchad : quelles sont les attentes de la jeunesse tchadienne ?

Debout à l'ombre d'un arbre, un jeune homme portant une casquette de base-ball noire regarde droit dans la caméra.
Légende image, Noubaramadji Mranganye votera pour la première fois de sa vie.
  • Author, Paul Njie, Michel Mvondo
  • Role, BBC News
  • Reporting from N'Djamena, Chad

Noubaramadji Mranganye a 34 ans mais n'a jamais participé à une élection.

Au cours des trois dernières décennies, ce jeune banquier a été témoin des luttes et des souffrances prolongées du peuple tchadien.

À l'occasion de l'élection présidentielle, il estime que le moment est venu, plus que jamais, de changer les choses.

"Pour la première fois, j'ai l'occasion de choisir quelqu'un qui me représentera vraiment demain et qui aidera également la génération future", a-t-il déclaré.

"Nous voterons parce que nous savons que l'éducation deviendra une priorité dans la république", a ajouté M. Noubaramadji.

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Pour de nombreux jeunes Tchadiens, le chômage, l'éducation, l'augmentation du coût de la vie et un système de santé sous-financé ne représentent qu'une infime partie de la myriade de problèmes qui paralysent le pays d'Afrique centrale. Pourtant, ils considèrent qu'il s'agit là des problèmes les plus urgents à résoudre en 2024.

Charles Bendiman sait exactement ce que l'on ressent lorsqu'on est sans emploi dans l'un des pays les plus pauvres du monde. Au Tchad, 42 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et gagne moins de 2 dollars par jour.

Après avoir obtenu un diplôme universitaire en communication marketing en 2021, il est rentré du Cameroun avec un sac à dos rempli de rêves, d'espoirs et de projets.

Charles, 28 ans, portant des lunettes et un t-shirt polo beige, regarde à l'intérieurto the camera.
Légende image, Charles Bendiman a obtenu son diplôme universitaire il y a trois ans, mais il est toujours à la recherche d'un emploi.

Pourtant, trois ans plus tard, il dit ne pas avoir de quoi être fier. À 28 ans, il se désespère d'être "diplomé sans emploi".

Il représente la jeune génération de Tchadiens qui ont perdu confiance dans les autorités.

"J'ai cherché du travail en vain. Si vous n'avez pas un membre puissant de votre famille où vous allez postuler, personne ne vous donnera un emploi", a-t-il déclaré.

Charles fait partie des 75 000 diplômés au chômage, selon les chiffres du Collectif pour les diplômés au chômage en 2021. Mais avec sa carte d'électeur toujours en poche, il considère que cette élection présidentielle est cruciale pour son avenir.

"Je demande à celui qui prendra le pouvoir après les élections du 6 mai de ne pas oublier les jeunes, en particulier les jeunes diplômés sans emploi."

Plan large du "Monument de l'Indépendance" à N'Djamena, la capitale du pays.
Légende image, Environ huit millions de Tchadiens devraient voter lors des élections présidentielles de mai 2024.

Profondément frustré par sa situation, Charles a rejoint les membres de l'Association de la jeunesse arc-en-ciel pour la stabilité sociale en Afrique (AJASSA). Le groupe a lancé une campagne de sensibilisation dans l'un des quartiers de N'Djamena, afin d'encourager d'autres jeunes à se présenter le jour du vote.

Le groupe défie les températures caniculaires - plus de 42 degrés celcius - pour aller parler aux gens de l'importance du vote. Ils ont en main des échantillons de cartes d'électeurs, un dépliant présentant les dix candidats et des lignes d'encouragement pour demander aux gens de ne pas boycotter le vote.

Si la plupart des jeunes à qui ils s'adressent sont favorables au vote, d'autres murmurent leur manque d'enthousiasme pour les élections, suggérant un résultat "déjà planifi��".

Mais dans un pays où le coût de la vie explose et où le niveau d'analphabétisme est alarmant, Désiré Mbairamadji, président de l'AJASSA, pense que cette élection cruciale offre une lumière au bout du tunnel.

"Nous espérons que les élections se dérouleront bien et que le choix du peuple tchadien sera respecté", a-t-elle déclaré.

Environ huit millions de personnes sont attendues pour voter.

À qui les jeunes apportent-ils leur soutien ?

La population du Tchad est très jeune : 65 % des habitants ont moins de 25 ans, ce qui montre à quel point il est important d'impliquer davantage de jeunes dans le processus électoral.

Alors que huit autres candidats sont en lice, les plus jeunes, le président de transition Mahamat Deby Itno et son premier ministre Succès Masra, séduisent les jeunes électeurs potentiels.

Masra, ancien économiste à la Banque africaine de développement, est "la chance que cette génération de Tchadiens a de changer les choses", déclare Noubaramadji Mranganye. Pour lui, 34 ans de dynastie politique de la famille Deby, c'est plus que suffisant.

D'autres considèrent le président de transition comme la meilleure personne pour ce poste. Guini Gueille soutient le chef militaire car "en trois ans [de transition], il a tenu toutes ses promesses, notamment auprès des jeunes".

Quel que soit le vainqueur, rien ne semble plus important pour les jeunes Tchadiens que de vivre dans un pays où leurs rêves peuvent devenir réalité.