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Dossier

Accusations de l’ex-associé de Takieddine

Après avoir été longuement recherché par la justice française, l’homme-clé des contrats d’armement entre la France, le Pakistan et l’Arabie Saoudite, Abdul Rahman El-Assir, a finalement été entendu par le juge Renaud Van Ruymbeke, les 6 et 7 novembre 2012, à Genève. L’homme d’affaires libano-espagnol a reconnu avoir versé de l’argent liquide à son ex-associé, Ziad Takieddine, en marge des contrats Agosta (sous-marins vendus au Pakistan) et Sawari II (frégates à l’Arabie Saoudite), renforçant ainsi la piste d’un possible financement politique occulte de la campagne présidentielle d’Edouard Balladur en 1995.

C’est Ziad Takieddine qui me demandait de lui remettre ce liquide, déclare El-Assir au juge Van Ruymbeke. C’était son problème et non le mien. (…) Ziad Takieddine souhaitait recevoir sa part sans attendre. C’est lui qui souhaitait recevoir une part en liquide. (…) Pour moi, c’était son argent et l’usage qu’il en a fait relève de sa seule responsabilité.

ziad takieddine dit avoir des preuves du financement par la libye de la campagne de nicolas sarkozy en 2007
ziad takieddine dit avoir des preuves du financement par la libye de la campagne de nicolas sarkozy en 2007
© reuters

Mis en examen pour « complicité d'abus de biens sociaux, blanchiment aggravé et recel d'abus de biens sociaux aggravés », Abdul Rahman El-Assir apparaît comme le principal bénéficiaire de l' « argent noir » de ces grands contrats, avec Ziad Takieddine, à travers un système complexe de sociétés financières off-shore.

Mais devant le juge Van Ruymbeke, l’intermédiaire dément avoir eu connaissance d’éventuels pots de vin politiques : « Je n'aurais jamais accepté que des rétro-commissions soient versées à qui que ce soit, déclare El-Assir. [...] Si je m'étais douté qu'il [s'était] agi de rétro-commissions à verser à des décideurs français, j'aurais refusé. J'ai toujours travaillé dans ce que je considère être la légalité, ce qui exclut les rétro-commissions. »

Durant cette longue audition en Suisse, révélée par nos confrères du journal Le Temps et que France Inter a également pu consulter, ce sont les principales étapes de l’affaire Karachi qui sont revisitées par Abdul Rahman El-Assir, dont l’appartement parisien (avenue Henri-Martin) a été saisi en novembre dernier par la justice.

Ainsi, l’homme d’affaire, imposé dans la dernière ligne droite par les balladuriens en 1994, revient en détail sur son rôle d’intermédiaire dans les marchés d’armement, sur ses liens d’affaires avec Ziad Takieddine, le régime saoudien ou la Première ministre du Pakistan, Benazir Bhutto. Il lève également une partie du voile sur ses relations avec les balladuriens (François Léotard, Renaud Donnedieu de Vabres, Nicolas Bazire…) et le lobbyiste américain, Paul Manafort (dont les relations avec l’équipe Balladur intrigue la justice). Enfin, il revient sur les menaces physiques dont il a été l’objet, après la présidentielle de 95, et sur l’intervention du libanais Rafic Hariri, au nom de Jacques Chirac, pour tenter de mettre fin, à coups de dollars, aux règlements de comptes entre réseaux chiraquiens et balladuriens.