Marguerite Duras, la littérature du désir

Marguerite Duras, dans son appartement rue Saint-Benoit, ©Getty - julio donoso
Marguerite Duras, dans son appartement rue Saint-Benoit, ©Getty - julio donoso
Marguerite Duras, dans son appartement rue Saint-Benoit, ©Getty - julio donoso
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Laure Adler nous raconte la vie de Marguerite Duras, de son enfance en Indochine, à ses succès littératires et à la fin de se vie, où très affaiblie elle ne parvenait plus à écrire, en passant par son engagement dans la Résistance et son égarement dans l'affaire du petit Grégory.

« Ma mère, elle n’avait pas beaucoup de temps. Elle était veuve avec trois gosses. On se lavait tous seuls. J’étais débrouillarde, j’étais rapide, je gagnais du temps, tout le temps, à tout. J’ai eu ce paradis de cette mère qui était tout à la fois : le malheur, l’amour, l’injustice, l’horreur… » Marguerite Duras

La mère de Marguerite Duras est distante avec elle et n’a d’yeux que pour son fils aîné. La jeune Marguerite est aussi une petite fille élevée sans père –  mort quand elle avait cinq ans. Elle grandit en Indochine dans des écoles de villages, entre deux frères. Marguerite Donnadieu n’a pris le nom de Duras qu’à l’occasion de la publication de son premier roman.

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La recherche de l'amour de sa mère

Que ce soit dans ses romans comme Le Barrage contre le Pacifique, son premier succès, ou dans des pièces de théâtre comme Des journées entières dans les arbres, ou dans des textes autobiographiques comme L’Amant, son livre traduit dans le monde entier, prix Goncourt ou dans son ultime texte intitulé C’est tout, Marguerite n’aura eu de cesse de chercher l’amour de sa mère, de lui prouver que si elle était devenue écrivain c’était pour lui rendre hommage.

Elle, la mère, l’invisible de l’histoire coloniale, elle, la désargentée, elle, la valeureuse éduquant ses trois enfants dans des conditions géographiques et économiques difficiles, elle, l’utopiste qui avait cru les Blancs de l’administration quand ils lui ont vendu un bout de terrain au bord du Pacifique pour y cultiver du riz, en lui disant qu’elle deviendrait riche.

Marguerite a le désir d’être écrivain et d’être publiée. Elle fait des études de droit tout en griffonnant des pages. À la fac, elle rencontre une bande de garçons qui vont devenir des copains. Philosophes, très cultivés, ils vont lui faire connaître le Paris des intellectuels. Parmi eux, l’un va se détacher et devenir son amoureux. Il s’appelle Robert Antelme. Avec lui, elle entrera dans un monde de jeunes pétris du désir de refaire le monde.

Entrée en Résistance

Elle est ensuite salariée au comité d’organisation du livre, dans un département chargé de répartir les quantités de papier qu’autorisent les Allemands aux maisons d’édition, étroitement surveillé par les Allemands. Cela lui fut reproché à la fin de sa vie. Ce qui est sûr, c’est que quelques mois plus tard, début 1943, elle donne sa démission et entre dans la Résistance avec Robert Antelme.

À la Libération, Marguerite Duras fait partie d’un groupe d’intellectuels déçus par le général de Gaulle, plus préoccupé selon eux de recoudre et de réparer la France que d’appliquer des réformes issues des valeurs de la Résistance prônant plus d’égalité entre les classes sociales.

Ses débuts dans l'écriture

En 1943, son premier roman paraît, Les Impudents. Cette publication ne sera ni remarquée ni commentée par le monde littéraire et le second non plus, La Vie Tranquille. Cela ne la décourage pas. Elle pense et répète à ses proches qu’écrire pour elle, c’est la seule chose qu’elle sache faire.

Le projet de l’écriture du Barrage contre le Pacifique vient d’une décision : Marguerite parlera désormais à partir d’elle, et, utilisera le matériau autobiographique comme source principale de son inspiration. Le texte, qui met en scène comme personnage principal une jeune fille du prénom de Suzanne, qui ressemble furieusement à la jeune Marguerite, évoque l’histoire familiale des Donnadieu, dirigée par la veuve entourée de ses trois enfants dans une Indochine gangrenée par le colonialisme. C’est une œuvre magistrale, tant par son architecture, son écriture que par le contenu de ce qui nous est révélé : la souffrance des petits Blancs exploités par les colonisateurs. Ce texte est aussi la matrice de plusieurs livres à venir de Duras. La presse puis le public ne s’y trompent pas. Ils plébiscitent l’ouvrage, qui publié en 1950, frôle le Goncourt et sera adapté au cinéma par René Clément en 1958 et Rithy Pan en 2008. Marguerite est « lancée » dans le monde littéraire.

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BIBLIOGRAPHIE

  • Romans, cinéma, théâtre, un parcours. 1943-1993, de Marguerite Duras (Collection Quarto, Gallimard)
  • Marguerite Duras, de Laure Adler (Ed. Gallimard, 1998 / Folio, 2014)

ÉQUIPE

  • Production : Laure Adler
  • Réalisation : Séverine Cassar
  • Comédienne : Joana Preiss
  • Prise de son : Adèle Caglar
  • Mixage : Basile Beaucaire et Cédric Diallo
  • Attachée de production : Emmanuelle Fournier
  • Coordination : Fanny Bohuon

Merci à la documentation d’actualité de Radio France et à l’INA

L'équipe

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